vendredi 22 février 2013

Entraînement inaugural

L'ancien 本部道場 (Hombu dôjô) de Taitô-ku est récemment passé des mains de Satô-sensei à Fukumoto-sensei, et a par la même occasion a récemment changé de nom. Pour fêter ça, ils ont fait un petit entraînement particulier ce soir, avec comme d'habitude une belle rangée de septièmes dan côté haut du dôjô.

Ça faisait un moment que je ne les avais pas vu, alors j'y ai traîné ma mère en visite à Tôkyô, pour qu'elle puisse admirer le gratin, et que je puisse m'en payer une bonne tranche. Ils m'ont tous mis chacun leur tour une avoinée sanglante (Satô-sensei, Waguri-sensei, Fukumoto-sensei), et quand tout a été fini, ils m'ont dit avec de grands sourires "T'as fait des progrès ; ça fait plaisir de te revoir. Tu continues à t'entraîner régulièrement ?".

Oui, moi aussi je vous kiffe les gars...

lundi 4 février 2013

Vieux Renard

Voilà, ça faisait une ou deux semaine depuis la reprise qu'Itô-sensei était particulièrement casse-bonbon, et prenait un malin plaisir à me taquiner avec acharnement, du genre "Mais c'est quoi ces mains de femme" ou "Mais qu'est-ce que c'est que ça, c'est pas comme ça qu'on fait du iaï au Japon" et puis "C'est quoi cette manière d'armer son sabre [il y a une expression qui veut dire littéralement "le tenir comme une merde" ; si si, on en apprend des choses au iaï au Japon] ? Faut faire comme ça ; t'as compris ?"

 Bon, et puis ce soir, il vient il me corrige une position de genoux sur le quatrième kata de la série seitei (tsuka-atte) avec son ton bourru habituel "Là angle droit, là aussi et là aussi, t'as compris ?", et puis il se tourne vers Onikubo-sensei, et il lui dit devant moi : "Bon, Rauch là, il faut absolument qu'il s'inscrive à la prochaine compétition, hein ? Tu lui explique."

Plus tard, je pliais mon hakama dans les vestiaires, et en passant il me pose paternellement la main sur la tête, et il me dit avec son petit sourire en coin : "T'es devenu bon toi ces derniers temps."

Vieux singe ! Je t'aime bien, va.

dimanche 9 décembre 2012

日中法明 (Les 4 universités)

Ce jour-là, c'était le tournois des quatre universités  日本 (Nihon 中央 (Chûô– 法政 (Hôsei– 明治 (Meiji). Mais attention, pas seulement entre les universités, mais également entre les clubs des différents campus des universités, ce qui fait que les kendôbu des campus d'Ikuta et de Surugadai étaient aussi présent pour représenter Meiji, et étaient des adversaires potentiels. Et de fait, ils l'on été, car la première (et seule) équipe que la mienne a affrontée venait d'Ikuta (les ploucs, dans la campagne, qui apprennent l'agriculture). Ils nous ont battu assez vigoureusement ; sur neuf combats, ils ont fait cinq victoires, trois défaites et un iki-wake (nul).

J'avais eu l'honneur d'être désigné 大将 (taishô, capitaine) par mes camarades de l'équipe D. Le combat était déjà perdu d'avance quand mon tour de tirer est arrivé (un capitaine tire en dernier, pour ceux qui l'ignorent) ; on avait déjà pris cinq défaites, malgré la remontée  courageuse de certains coéquipiers, et un combat féroce, mais perdu, par mon "bras droit" Awa-chan (il tirait en tant que 副将, fukushô).
Pas de combat décisif donc, mais le champ libre "pour l'honneur". Avant de me présenter sur le terrain, j'ai remonté toute la file des sempai derrière nous, en cognant la pogne à chacun d'entre eux sous leurs cris de guerre. Alors quand je suis arrivé en face de mon adversaire sur le shiaïjô, une tête et bien dix kilos de plus que lui, il était tellement à l'aise qu'il a vacillé au moment de saluer, et manqué de se casser la figure. Rire de ses propres sempai. J'avais nettement l'avantage.
Et bien je n'ai même pas réussi à l'emporter dites ! J'ai fait mon bête kendô scolaire, avec du men à tout va, sage et sans innovation ni prise de risque (avec ces petits nerveux de Japonais, il faut dire aussi, les prises de risque ça se finit souvent tragiquement). Un meilleur seme que d'habitude (je travaillais ça à ce moment-là... travaille encore d'ailleurs...), mais je reste trop fixe, sans réelle attitude offensive. Le chronomètre tourne, et je finis un peu tristement sur un iki-wake, alors que j'avais en mains les cartes pour un victoire écrasante. Un peu déçu.

Voilà la vidéo, que mes coéquipiers ont eu la gentillesse de tourner et d'envoyer sur votre ami YouTube. Je suis le grand, en rouge :



Pour mémoire également, et pour la comparaison, voici mon combat (troisième position dans l'équipe 3) fin octobre (21), contre un membre du kendôbu de l'université de Waseda, lors d'une rencontre amicale à Meiji. Je suis aussi en rouge, plus offensif (et ça paye), mais moins menaçant, moins au centre, plus brouillon :



Pas mon truc, hein, la compétition. Mais on persévère. Ah-hoo.

Ah oui, les filles ont encore déchiré leur race, comme toujours.  Hourra pour les filles de Meiji !



vendredi 23 novembre 2012

Recette du temps perdu (marinade traditionnelle japonaise)


Niveau : enfantin
Macération : environ 15 heures
Energie : 0 kcal
Pour : une douzaine de personnes (plat très inconsistant)
Cuisson : sur des charbons ardents

Ingrédients :
-        1 compétition universitaire ;
-        1 grand gymnase de l’université de Tokyo à conserver à température ambiante (fin novembre) ;
-        1 plein jour de vacance exceptionnel, dilué dans un emploi du temps chargé ;
-        1 temps pourri à garder au chaud sous la couette ;
-        1 poignée de sempai expérimentés ;
-        1 gros bouillon d’assistants ;
-        1 soupçon d’exaspération ;
-        1 dose de mauvaise humeur.

Préparation :
1.     Levez-vous vers 6h30. Faites vos exercices quotidiens et prenez un petit déjeuner morose. Emballez votre armure, vos shinaï, et partez prendre le train en oubliant d’emporter un repas de midi.
2.     Rendez-vous à 8h40 à l’arrêt Komaba, près du campus de l’université de Tokyo. Attendez les quelques retardataires au milieu des courants d’air. Faites la queue sous la pluie devant le gymnase pour rentrer un par un. Montez au 4ème. Posez vos affaires. Attendez.
3.     Aidez à accrocher l’étendard de l’université au mur (vous êtes grand). Soyez remercié pour ça. Attendez.
4.     Regardez les sempai de l’équipe 1 se mettre en tenue. Gelez-vous les pieds sur ce putain de parquet glacé. Attendez.
5.     Regardez les sempai de l’équipe 1 mettre leur armure, puis regardez-les s’échauffer pendant que vous sautillez sur place pour avoir l’illusion de sentir les extrémités de vos membres. Attendez.
6.     Vers 10h, rassemblez-vous avec les autres en rang pour la (brève) cérémonie d’ouverture : Bonjour à tous. Bla bla. Ichidô… rei. Bonjour à tous. « Bonjour ! » Discours inaudible d’un sempai de Tokyo. Ichidô… rei. Bonjour à tous. « Bonjour ! » Discours inaudible d’un sempai de Waseda. Ichidô… rei. Bonjour à tous. « Bonjour ! » Discours inaudible d’un sempai de… Attendez qu’on ait fait le tour des 6 universités. Ichidô… rei. Rupture des rangs. Attendez.
7.     10h30 pétante, début de la compétition individuelle. Allez encourager Takano-sempai qui combat. Sautillez sur place. Attendez. Allez encourager Oda-sempai qui combat. Sautillez sur place, battez des bras. Attendez…

8.     Pause de 13 heures. Faites l’aller-retour au combini le plus proche avec Nishiyama-sempai pour occuper votre estomac (ACTION !). Revenez avant 14 heures. Interrompez votre sandwich, la compétition en équipe va bientôt commencer. Rassemblement. Attendez. Explications. Rupture des rangs. Attendez.
9.     Regardez les sempai de l’équipe 1 faire leur second échauffement. Battez des mains, des pieds, des oreilles, enfin, bougez quelque chose quoi. Attendez.
10. Début de la compétition en équipe vers 14h30. Allez encourager l’équipe de l’université. Battez de tout de qui bouge. Attendez. Changez de shiai-jô, acclamez l’équipe de l’université. Asseyez-vous en seiza, en tailleur, puis en seiza encore. Attendez. Continuez à pétrir la pâte jusqu’à ce que mort cérébrale s’ensuive.

11. Réveillez-vous ! (vous piquiez du nez, je vous ai vu !). Il est 18h30 à l’horloge, la compétition en équipe s’achève. Attendez. Rassemblement. Attendez. Discours. Discours, discours. Attendez. Remise des récompenses, équipes de filles, équipe championne, vice-championne, bronze, 3 combattantes par équipe, 3 médailles par équipe. Equipes de garçons, 9 combattants par équipe, neufs médailles autour du cou par équipe, salut aux sempai, saluts aux équipes, salut à l’horloge, salut salut salut. Attendez.
12. Retour dans les rangs. Il faut se dépêcher, on est sur le point de dépasser le temps réglementaire d’occupation du gymnase (comment se fait-ce ?). Attendez. Tout le monde range ses affaires. Attendez on vous dit.
13. Retour à la gare, retour à Meidaimae, retour à la maison, posez l’armure non déballée  dans votre chambre douillette, il est quelque chose comme 19h15

Attendez ! C’est pas fini !

14. Retour au pas de course à Meidaimae, rendez-vous devant l’izakaya à 19h30. Attendez l’arrivée des sempai. Aidez à mettre deux coussins dans un coin et trois assiettes sur une table. Faites-vous indiquer une place. Attendez. Faites-vous indiquer une autre place finalement. Attendez. Revenez à l’entrée avec les autres.
15. Les sempai arrivent au compte-goutte, essayez de vous investir en vous emparant d’un cintre. Attendez. Par désespoir, rendez le cintre à un camarade de 1ère année, qui s’empressera d’y accrocher les effets d’un sempai. Attendez. Mettez-vous à une nouvelle place qu’on vient de vous indiquer après mûre, mûre, mûre réflexion. Attendez. Asseyez-vous. Attendez.
16. Discours d’introduction de beuverie d’un sempai. Beuverie. Buvez un peu, attendez. Des plats arrivent. Attendez. MANGEZ ! Mangez, mangez, mangez (ça occupe). Attendez. Ça bouge, ça parle, ça rigole. Observez, buvez un peu, attendez. Changez de place. Papoter cinq minutes avec un sempai en faisant bien attention à ce que vous dites (ACTION !). Attendez. Reproduisez le motif tout le pourtour de la soirée. Mangez encore un peu pour assaisonner.
17. 21h30, l’heure de quitter les lieux. Attendez. Les sempai se lèvent, ont leur tend leurs effet. Attendez. Ça écluse lentement. Réunissez vos propres affaires en trois mouvements simples et précis. 「忘れ物や落し物を忘れないようにご注意下さい!」. Attendez. Trépignez sur place. Attendez. Sortez dehors d’un pas mesuré (self-control). Attendez. Tout le monde sort en titubant, lentement, lentement, lentement, re-rentre, ressort, va chercher un sempai, revient, retourne, va chercher une écharpe oubliée (忘れ物を忘れないように…), remet ses chaussures, se rassemble plus ou moins en groupes vaguement organisés dans la rue…
18. On remet ça pour la seconde partie de la soirée dans un autre endroit ! Vous venez ? Vous déclinez l’invitation, vous êtes vraiment confus, vous travaillez le lendemain (oui, vous donnez de modestes leçon de français tôt le samedi matin à Shibuya), vous vous confondez en excuses, kaesasete-itadakimasu, vous recevez littéralement la faveur qu’on vous laisse ENFIN rentrez chez vous, et vous vous carapatez avec un dernier signe d’adieux amical. Omote, ura, vous êtes tout retourné, sans dessus-dessous.
19. Il est 22 heures, et vous avez passé une merveilleuse journée.



Croyez-moi, un plat comme ça, ça vous tient au ventre. Vous le remâchez ensuite pendant des semaines, et on vous en resservira à volonté, jusqu’à l’écœurement.

Bonne dégustation !

dimanche 18 novembre 2012

Trois familles


Le voilà, il est tout neuf, je l'ai reçu hier.
Pour ceux qui ne savent pas lire, c'est écrit verticalement Rauch, et au-dessus mei-ji-dai, abréviation pour Université de Meiji. Donc maintenant, je fais vraiment partie de la famille.

Trois familles



dimanche 4 novembre 2012

60ème Championnats Japonais de Kendô (第60回全日本剣道選手権大会)

Takanabe (droite) en 1/4 de finale

Hier se déroulaient les championnats du Japon en Kendô, au Nihon Budôkan de Tôkyô (station Kudanshita). C’était un évènement à ne pas manquer, alors j’y suis allé avec Yukiko, et nous y avons retrouvé Nozaki et les Nagase. On est entré vers le milieu de l’après-midi, et on a assisté à toute la fin des combats depuis les quarts de finale.

La grande surprise du jour, c’est que le favori, Takanabe-san (高鍋), capitaine de l’équipe nationale et champion en titre depuis deux ans, s’est fait éliminer sur un kote de son adversaire dans les dernières minutes de combats de demi-finale. Il a eu beau tenter d’égaliser, le temps restant était trop court, et même s’il a fait podium en troisième position, le voilà détrôné par Kiwata-san (木和田), originaire d’Ôsaka et lui-même membre de l’équipe nationale, qui a finalement accédé à la médaille d’or en battant Uchimura-san (内村) en finale. Ce dernier était mon favori, car c’est un sempai de l’université de Meiji ! Il a quand même réussi à obtenir la seconde place. Finir deuxième meilleur combattant de tout le Japon, ça reste quand même assez remarquable, non ?

L’autre bonne nouvelle pour Meiji, c’est que l’équipe masculine a remporté la troisième place le week-end dernier lors de la compétition nationale interuniversitaire à Ôsaka, derrière Kokushikan (1ère place, sans surprise) et Chûo (seconde place). Comme quoi, Meiji n’est peut-être que 23ème au classement national des universités japonaises, mais pour le kendô, j’ai eu la main plutôt heureuse…

On est resté jusqu’à la cérémonie de clôture des championnats, et c’était assez impressionnant, car il n’y avait pas uniquement les combattants du jour, mais également tous les champions régionaux des différentes préfectures du Japon. Donc depuis les gradins, on avait une vue plongeante sur la crème de l’élite des combattants japonais en matière de kendô. Ça fait quand même un petit quelque chose. La plupart ont moins de 30 ans et se situent entre le 4ème et le 5ème dan, je présume. Takanabe et Kiwata sont un peu des exceptions, car ils ont respectivement 36 et 34 ans et sont tous les deux 6ème dan (Renshi pour Takanabe).

Ce qui était intéressant avec Kiwata, c’est qu’il n’avait pas l’air particulièrement impressionnant à première vue. Ses deux derniers adversaires étaient beaucoup plus offensifs, semblaient plus mobiles et plus rapides. Il avait même plutôt l’air de subir les attaques, et de se « contenter » d’éviter globalement de prendre un point… jusqu’à ce moment terrible où il a mis un kote tout banal à Takanabe, dans un creux de vague, deux minutes avant la fin du combat.
Même genre de combat en final contre Uchimura, qui est petit, mobile, très offensif et menace loin dans la garde adverse : Kiwata garde une attitude extérieure passive, contrôle presque « lentement », et dans les dernières minutes, place une technique simple sortie de nulle part, exactement dans le bon temps.


Enfin, moi je vous raconte tout ça, mais les vidéos sont déjà visibles sur Internet, alors vous pourrez vérifier par vous-même...

jeudi 1 novembre 2012

6ème dan de Hirai-sensei

Ce soir, on a fêté le sixième dan de Hirai-sensei, le responsable de la taidôren. Il y avait Nagao-sensei, avec qui j'ai pu faire ji-geiko pour la première fois, et un autre sensei de leurs amis. On a beaucoup bu et beaucoup mangé, comme à chaque fois. J'ai eu l'honneur d'être invité à leur table, parce qu'en fait je suis vieux. C'était un peu une révélation, parce que je suis le petit gaijin tout frais arrivé, mais Nagao-sensei a fait remarquer que j'étais dans l'année de mes 25 ans, soit plus âgé que n'importe lequel de mes camarades. Or, la loi d'aînesse (bénie soit-elle) me donne le droit de manger à la table des sensei et sempai. J'ai donc eu la lourde tâche d'acquiescer à tous les propos de Nagao-sensei, qui m'avait placé à sa gauche, en lui remplissant ses verres dès qu'il étaient vides.
En plus de la bière, on a bu un alcool chinois assez fort, avec un goût de noix fumée, dont je ne me souviens plus le nom.

Quant au kendô de Nagao-sensei, et bien c'est du haut niveau. Très offensif, très mobile, très souple, avec un seme très fort, beaucoup de frappes de très près si on ne se replace pas à distance. Avec moi il a été gentil, mais il n'hésite pas à envoyer des mawashi-katate-men dans les oreilles de ses élèves pour leur apprendre la vie, ou leur taper sur le crâne au passage pour qu'ils aillent plus vite. Bref, vous l'aurez compris, c'est un peu du Fukumoto-sensei en version 7ème dan. On ne se demande pas pourquoi Meiji est réputée en kendô.

Pour finir, une photo de mes chers camarades de la taidôren. Il y en a une avec moi dessus, mais comme les Japonais, qui adorent les photos, ne savent généralement ni cadrer, ni faire la netteté, je ne la mets pas. Et puis moi, vous connaissez déjà ma tronche.

Au centre, de part et d'autre : Nishiyama - Tamura
Dans le dos de Tamura : Bonkohara-sempai
Tout à gauche en costard : Yamamoto
Tout à droite devant : Shibuya (elle est trop mignonne !)
Derrière Shibuya : Kojima-sempai